A Madame ***


I

Ce livre errant qui va l'aile brisée,
Et que le vent jette à  votre croisée
Comme un grêlon à  tous les murs cogné,

Hélas ! il sort des tempêtes publiques.
Le froid, la pluie, et mille éclairs obliques
L'ont assailli, le pauvre nouveau-né.

Il est puni d'avoir fui ma demeure.
Après avoir chanté, voici qu'il pleure ;
Voici qu'il boite après avoir plané !

II

En attendant que le vent le remporte,
Ouvrez, Marie, ouvrez-lui votre porte.
Raccommodez ses vers estropiés !

Dans votre alcà´ve à  tous les vents bien close,
Pour un instant souffrez qu'il se repose,
Qu'il se réchauffe au feu de vos trépieds,

Qu'à  vos cà´tés, à  votre ombre, il se couche,
Oiseau plumé, qui, frileux et farouche,
Tremble et palpite, abrité sous vos pieds !