Tel j'étais autrefois et tel je suis encor.
Quand ma main imprudente a tari mon trésor,
Ou la nuit, accourant au sortir de la table,
Si Laure m'a fermé le seuil inexorable,
Je regagne mon toit. Là , lecteur studieux,
Content et sans désirs, je rends grâces aux dieux.
Je crie: O soins de l'homme, inquiétudes vaines!
Oh! que de vide, hélas! dans les choses humaines!
Faut-il ainsi poursuivre au hasard emportés
Et l'argent et l'amour, aveugles déités!
Mais si Plutus revient, de sa source dorée,
Conduire dans mes mains quelque veine égarée;
A mes signes, du fond de son appartement,
Si ma blanche voisine a souri mollement:
Adieu les grands discours, et le volume antique,
Et le sage Lycée, et l'auguste Portique;
Et reviennent en foule et soupirs et billets,
Soins de plaire, parfums et fêtes et banquets,
Et longs regards d'amour et molles élégies,
Et jusques au matin amoureuses orgies.
Tel J-etais Autrefois
Andre Marie De Chenier
(1)
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